mercredi 2 septembre 2009

Croix



Nous avons ces morts en héritage
nous sommes devenus les pères de nos morts
nous pitoyables parâtres
qui avons engendré ces hommes dans la mort
et nous voici séparés d'eux par leur cadavre
eux qui sont déjà morts et fondés en la nuit.

Notre obscure journée s'éblouit de leur nuit
notre chair se révulse au contact de leur ombre
nous n'avons pas assez de nos nuits pour nous terrer
nous sommes nus jusqu'à la moelle dans leur gloire
et nos mots tombent en poussière en leur pensée
nous sommes devenus étrangers à nous-mêmes
de grands vents soufflent qui nous chassent de la chair
nous tremblons de mourir et nous tremblons de vivre.


Pierre Emmanuel
extrait de Jour de colère, Chariot
Photos : Croix sur le Mézenc

1 commentaire:

Bifane a dit…

N'étions-nous donc nés que pour ça ?
Trembler...