vendredi 10 juillet 2015

protéiforme



Les restes de l'insomnie s'accumulent dans mes chevilles, j'avance avec peu de certitudes, la vie pulse dans le corps dans la tête, parfois me soulève et m'entraîne dans des élans où je pourrai toucher l'infini. Parfois je m'endors dans des ressassements qui me font choses mortes inertes. L'absurde me saute sur les épaules où il pèse de tout son poids. Devant moi tant de désastre, de désarroi, je marche au hasard des fulgurances, elles scintillent dans un ciel obscur et lointain. 

Près d'eux la nuit sous la neige je reviens parfois et je me tiens, droite. Au bord d'un abîme, j'oscille lentement. Dehors le vent s'éparpille et se cogne aux vitres de mes fenêtres. Je les revois tous deux, silhouettes menues disparaissant à l'horizon. Devant moi un grand espace libre que je déchiffre avec peine en plissant les yeux. Des lettres s'inscrivent sur le sable: le cadeau de l'effacement. Je trébuche sur ces vastitudes, passe en revue des images empilées sous une couche épaisse de souvenirs, durcis par le temps, l'érosion. Je retiens la photo floue d'une enfant rêveuse, joueuse, émerveillée devant la vie. Le regard perdu à l'intérieur, perdu le chemin, perdue la boussole! Élagué, sanglant, à longueur de nuit je bâtis, je n'ai pas fini ma construction, elle s'étage vers le ciel s'étend dans l'espace, elle cherche à toucher un infini qui s'échappe, elle creuse dans des obscurités qu'elle apprivoise, elle cherche à habiter le vide, le nommer. 

Le verre se fêle, l'image se glace, se recouvre de givre, avorte et fuit, mercure éclaté, dispersé dans le vide, éparpillé au vent de nul part. Elle poursuit sa route dans un atome minuscule, une onde infime qui n'a pas besoin de conscience qui existe pourtant.

Un léger tremblement de feuilles, un bleu pâle évanescent, un fin nuage blanc, au loin un chant d'oiseau, le son ténu d'une cloche dans le matin, l'instant où je me tiens preuve d'un réel inoublié. Immobile et traversée par la lumière. Il n'y a plus de temps, il y a un espace intérieur à chercher encore. La carapace exploratoire.                                                                                                                             

1 commentaire:

mémoire du silence a dit…

"l'éternité de l'instant de l'amour"