vendredi 1 avril 2016

Les voix





"Les voix chère Marcelline, ce sont les fleurs de l'éternel mises dans notre bouche. Elles fleurissent notre crâne de mots à venir. Elles ne s'éteignent pas avec nous, elles s'éloignent, et c'est le travail du poème que de les faire revenir près de nous. La voix de mon père avait quelque chose de la croûte d'un pain chaud. Elle s'ouvrait se donnait, était par elle même nourricière. Votre voix à vous : le chant d'une rivière inquiète qui ne dort jamais. Ce n'est pas une image. Je vais chercher là-bas de quoi éclairer ici. C'est ce qu'on appelle "poésie", n'est ce pas ? Il faudrait un autre nom ou même aucun, et simplement dire: croyez le ou non, mais en entendant le chant de la rivière dans le bois de Saint Cernin, j'ai vu un livre plus beau que tous les livres. Il était signé Marcelline et s'écrivait avant ma naissance, après ma mort, tout le temps et toute l'éternité"

Christian Bobbin: La grande Vie