dimanche 6 juin 2010

"Poignée de terre"


Le jour est si fragile à la corne du bois
que je ne sais plus où ni comment ce matin
poser mes yeux, ma voix, poser ce corps d'argile
si drôlement qui craque à la croisée des ombres.

J'ai peur soudain, oui peur de n'être que cela:
une poignée de terre qu'un souffle obscur à l'aube
tient dans sa paume, et qu'il ne s'épuise d'un coup
et me laisse tomber dans la poussière du temps,

comme ces fruits qu'aucune bouche n'a touchés
et qui roulent sans fin dans la nuit des famines.
Seigneur, si vous êtes ce souffle obscur et si
fragile à la corne du bois, et si je suis

ce corps, resserrez votre paume, resserrez-là.

Poème de Guy Goffette
Extrait de l'adieu aux Lisières

Sculpture de Rodin

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